Amateurs sur scène : retour à case départ et tout (re)commencer !

Coup de théâtre ! Après avoir divulgué cet été une nouvelle version de l’avant projet de loi sur la participation des amateurs aux représentations de spectacle vivant qui a suscité une grande inquiétude, la rue de Valois a annoncé le 9 septembre dernier que ce texte était retiré, la forme législative écartée et qu’un travail de concertation reprenait dès cet automne.

 

Une année plus tôt, au printemps 2007, l’accord des syndicats de salariés, d’employeurs, des pouvoirs publics et des fédérations de pratique en amateur avait semblé un moment possible. La COFAC avait alors manifesté son soutien à la logique du texte non sans poser un certain nombre de questions qui étaient restées sans réponse.
A l’été 2008, soit après un an de silence, un décret d’application, élaboré sans concertation et jugé par beaucoup comme inopérant et contreproductif, était divulgué sans explications. Il fut accompagné d’un communiqué maladroit et ambigu de Christine Albanel. La levée de bouclier fut générale aboutissant au retrait d’un avant-projet de loi qui comportait pourtant de l’avis de tous des avancées.

En effet, les amateurs auraient tort de se réjouir du retrait d’un texte qui avait le mérite de mettre fin à un flou juridique. En effet, la situation des amateurs est supposée être régie par un décret de 1953, texte aujourd’hui obsolète et qui n’est plus réellement appliqué. En conséquence, les organisateurs de spectacle d’amateurs sont toujours à la merci d’une interprétation stricte du code du travail qui plaide pour une présomption de salariat. Le texte initialement mis au débat donnait une définition –imparfaite de ce qu’était un amateur (jusqu’à présent, l’amateur est défini par ce qu’il n’est pas), n’opposait pas les amateurs et les professionnels et s’attachait à définir une réglementation plus claire, en particulier en s’appuyant sur la notion de cadre lucratif et non-lucratif de la manifestation. Il confortait le cadre dans lequel se produisent les amateurs, à savoir le cadre non-lucratif.
Du côté des points critiquables du texte, les amateurs pointaient l’obligation de porter mention de la présence d’amateurs pour les spectacles dans un cadre lucratif, mais surtout un décret d’application qui n’exemptait pas les amateurs des obligations du cadre lucratif, lequel prévoit que les amateurs sont rémunérés. Si dans certains cas, il est logique que les amateurs soient rémunérés pour ne pas porter concurrence aux professions du spectacle, d’autres pratiques courantes pouvaient être menacées soit pour des raisons d’ampleur du spectacle, soit parce la nature du projet envisage la collaboration entre amateurs et professionnels, soit parce que le cadre de production pouvait être jugé lucratif (un café, une MJC…)

Pour l’heure, il faudra donc (re)commencer…La Ministre de la Culture annonce dans son communiqué du 11 septembre qu’ « aucune décision ne sera prise( …)tant qu’un véritable consensus n’aura pas été dégagé entre toutes les parties. Les amateurs ne peuvent que s’en féliciter d’autant plus que la Cofac et les fédérations d’amateurs la composant seront officiellement consultées.

En effet, les amateurs ne pourront que compter sur leurs propres forces pour que les travaux annoncés leur permettent de se produire dans une totale sécurité juridique : depuis 30 ans environ, le Ministère n’a pas de politique envers les amateurs. A la DMDTS , l’expression « pratiques amateurs » a même disparu de l’organigramme officiel remplacé par « pratiques artistiques ». Sauf symboliquement, cela ne change pas grand chose : le bureau, composé de 4 agents, n’a aucun moyen pour mettre en place une véritable politique à l’attention des amateurs. Même constat dans les DRAC où les amateurs sont à peine reçus. Dans le même temps, la pratique en amateur s’est largement développée surtout sous la forme associative (progression de plus de 5% par an). Le Ministère est resté indifférent au phénomène, à tel point qu’il ne prend même pas la peine de le mesurer : la dernière enquête sur les amateurs remonte à 1995 !

Au delà de la clarification juridique de sa place et de son statut sur scène, il est temps que les pouvoirs publics reconnaissent et considèrent à nouveau les pratiques artistiques en amateur comme un vivier de culture populaire et de lien social, comme une contribution citoyenne à la vie des territoires.

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Pratiques en amateur

Mis à jour le 2 octobre 2008